si nous n’emportons sac et bagage, nous en avons du moins quelque chose[1].
(Corin et Touchstone sortent.)
CÉLIE.—As-tu entendu ces vers ?
ROSALINDE.—Oh ! oui, je les ai entendus, et plus encore : car quelques-uns d’eux avaient plus de pieds que les vers n’en doivent porter.
CÉLIE.—Peu importe ; les pieds pouvaient porter les vers.
ROSALINDE.—Oui ; mais les pieds étaient boiteux et ne pouvaient se supporter eux-mêmes sans les vers. Voilà pourquoi ils boitaient dans les vers.
CÉLIE.—Mais les as-tu entendus sans te demander comment ton nom se trouvait gravé sur ces arbres, et d’où y venaient ces vers ?
ROSALINDE.—J’avais déjà passé sept jours de surprise sur neuf avant que tu fusses venue ; car vois ce que j’ai trouvé sur un palmier[2] : on n’a jamais tant rimé sur mon compte depuis le temps de Pythagore, alors que j’étais un rat d’Irlande[3] ; ce dont je me souviens à peine.
CÉLIE.—Devineriez-vous qui a fait cela ?
ROSALINDE.—Est-ce un homme ?
CÉLIE.—Un homme ayant au cou une chaîne que vous avez portée jadis. Vous changez de couleur ?
ROSALINDE.—Qui, je t’en prie ?
CÉLIE.—O seigneur ! seigneur ! il est bien difficile que des amis se rencontrent ; mais les montagnes peuvent être déplacées par des tremblements de terre, et se retrouver.
ROSALINDE.—Mais, de grâce, qui est-ce ?
CÉLIE.—Est-il possible ?
ROSALINDE.—Oh ! je t’en prie maintenant avec la plus grande instance, dis-moi qui c’est.
CÉLIE.—O merveilleux, merveilleux, et très-merveilleusement