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rôle, ou comme un animal furieux qui, plein de rage, affaiblit son
propre cœur par l’excès de sa force, ainsi moi, par manque de
confiance, j’oublie d’accomplir toute la cérémonie des rites de l’amour,
et surchargé du fardeau de la force de mon amour, l’énergie de mon amour
semble décroître. Oh ! que mes lèvres servent d’éloquence et d’avocats
muets à mon cœur qui te parle, ils plaident mon amour et réclament ma
récompense mieux que cette langue qui en a souvent dit bien davantage.
Oh ! apprends à lire ce qu’a écrit un amour silencieux, c’est un apanage
la table de mon cœur ; mon corps est le cadre qui contient ce portrait,
et la perspective est le plus grand art du peintre ; mais il faut que
vous jugiez du talent à travers le peintre, pour trouver votre fidèle
image là où elle repose suspendue dans le magasin de mon cœur ; les
fenêtres en sont vitrées de tes yeux. Vois quels services les yeux ont
rendu aux yeux. Mes yeux ont retracé ta personne, et les tiens servent
de fenêtre à mon sein ; le soleil prend plaisir à regarder au travers
pour te contempler à son aise, mais il manque aux yeux un secret pour
compléter leur art, ils ne retracent que ce qu’ils voient, ils ne
publics et de titres orgueilleux ; pour moi à qui la fortune refuse de
semblables triomphes, je trouve une joie inespérée dans ce que j’honore
le plus. Les favoris des grands princes étendent leurs pétales au soleil
comme le tournesol ; leur orgueil reste enfoui dans leur sein, car un
froncement de sourcil les fait périr dans toute leur gloire. Le guerrier
qui a lutté toute sa vie, célèbre par son courage, n’a qu’à perdre une
fois la partie après un millier de victoires, il est effacé du livre de
l’honneur, et on oublie tout ce qu’il avait gagné ; tandis que moi, je
suis heureux, j’aime et je suis aimé, là où je ne puis changer et où
{{Titre|Sonnets|William Shakespeare|