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SUR SHAKSPEARE.

bres ; vois comme la dévotion a donné à chaque maison une grosse branche ou un rameau ; tout ce qui était porte ou portique est devenu une arche, un tabernacle formé d’épines blanches élégamment entrelacées [1]. »

Et cette élégance des chaumières est la même dont se pareront les châteaux ; les champs et des fleurs, c’est ce que chercheront les jeunes gentilshommes comme les garçons du village. Laissez faire la joie pour que l’égalité s’établisse entre les plaisirs ; la joie a ses symboles qui ne varient point ; elle ne les changera pas plus selon les situations que selon les saisons. Ici elle semble, conduite par l’abondance, parcourir l’année à travers une série de fêtes. Comme le premier de mai étale ses arcades de verdure, comme la tonte des brebis jonche les rues de fleurs, comme les épis font la parure de la fête des moissons, de même Noël aura ses salles tapissées d’ifs, de houx et de laurier vert. Comme les danses, les courses, les spectacles, les combats rustiques font retentir de leurs sons joyeux le ciel du printemps, de même les mascarades « où la chemise par-dessus l’habit tient lieu de déguisement, où un visage charbonné sert de masque, » perceront des cris de leur gaieté les froides nuits de décembre ; et, ainsi que l’arbre de mai, la bûche de Noël sera apportée en triomphe et célébrée par des chants.

C’est au milieu de ces jeux, de ces fêtes, de ces banquets, dans ces réunions si multipliées, au sein de cette joyeuse et habituelle « convivialité, » pour me servir de l’expression nationale, que prenaient place et chantaient les ménestrels ; et leurs chants avaient pour objet les traditions de la contrée, les aventures des héros populaires comme celles des ancêtres du château, les exploits de Robin Hood contre le shériff de Nottingham

  1. Herrick, contemporain de Shakspeare, est connu par un recueil de jolies poésies rurales, publiées sous le titre d’Hespérides.