Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 1.djvu/456

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ACTE QUATRIÈME


SCÈNE I

La scène est près d’une porte de Rome.
CORIOLAN paraît avec VOLUMNIE, VIRGILIE, MÉNÉNIUS, COMINIUS, et plusieurs jeunes patriciens.

coriolan.—Allons, arrêtez vos larmes : abrégeons nos adieux : le monstre aux mille têtes me pousse hors de Rome. Quoi, ma mère ! où est votre ancien courage ? Vous aviez coutume de me dire que l’adversité est l’épreuve des âmes ; que les hommes vulgaires peuvent supporter de vulgaires infortunes ; que par une mer calme, tous les pilotes paraissent maîtres dans l’art de manœuvrer ; mais que les coups de la fortune, quand elle frappe au cœur, pour être supportés avec calme, demandent une noble adresse. Vous ne vous lassiez point de nourrir mon âme de principes faits pour la rendre invincible.

virgilie.—Ciel, ô Ciel !

coriolan.—Femme, je te conjure…

volumnie.—Que la peste se répande dans tous les ateliers de Rome, et que tous les artisans périssent !

coriolan.—Quoi ! ils vont m’aimer dès qu’ils m’auront perdu. Allons, ma mère ; rappelez le courage qui vous inspirait lorsque vous me disiez que, si vous eussiez été l’épouse d’Hercule, vous vous seriez chargée de six de ses travaux, pour épargner à votre époux la moitié de ses fatigues.—Cominius, ne vous laissez pas abattre ; adieu.—Adieu, ma femme, adieu. Ma mère, adieu ; consolez-vous : je me tirerai d’affaire.—Toi, bon vieillard,