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ANTOINE ET CLÉOPÂTRE.

que ce soit, tu es sûr de perdre. Il a tant de bonheur, qu’il te battra malgré tous tes avantages. Dès qu’il brille près de toi, ton éclat s’éclipse. Je te le répète encore : ton génie ne te gouverne qu’avec terreur, quand il te voit près de lui. Loin de César, il reprend toute sa grandeur.

Antoine.

Va-t’en et dis à Ventidius que je veux lui parler. (Le devin sort.) — Il marchera contre les Parthes… Soit science ou hasard, cet homme a dit la vérité. Les dés même obéissent à César, et, dans nos jeux, il gagne ; ma plus grande adresse échoue contre son bonheur, si nous tirons au sort ; ses coqs sont toujours vainqueurs des miens, quand toutes les chances sont pour moi, et ses cailles battent toujours les miennes dans l’enceinte où nous les excitons entre elles. — Je veux retourner en Égypte. Si j’accepte ce mariage, c’est pour assurer ma paix ; mais tous mes plaisirs sont dans l’Orient. (Ventidius paraît.) Oh ! viens, Ventidius ; il faut marcher contre les Parthes : ta commission est prête ; suis-moi, et viens la recevoir.

(Ils sortent.)



Scène IV

Une rue de Rome.
LÉPIDE, MÉCÈNE, AGRIPPA.
Lépide.

Qu’aucun soin ne vous retienne plus longtemps : hâtez-vous de suivre vos généraux.

Agrippa.

Seigneur, Marc-Antoine ne demande que le temps d’embrasser Octavie, et nous partons.

Lépide.

Adieu donc, jusqu’à ce que je vous voie revêtus de votre armure guerrière, qui vous sied si bien à tous deux.

Mécène.

Si je ne me trompe sur ce voyage, Lépide, nous serons avant vous au mont de Misène.

Lépide.

Votre route est la plus courte : mes desseins m’obligent de prendre des détours, et vous gagnerez deux journées sur moi.

Agrippa et Mécène.

Bon succès, seigneur !

Lépide.

Adieu.