Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 2.djvu/263

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pu se contenir celui qui a un cœur pour aimer, et dans ce cœur le courage de manifester son amour ?

LADY MACBETH. — Aidez-moi à sortir d’ici. Oh !

MACDUFF. — Secourez lady Macbeth.

MALCOLM. — Pourquoi retenons-nous nos langues ? C’est à elles surtout qu’il appartient d’exprimer de pareils sentiments.

DONALBAIN. — Eh ! pourquoi parlerions-nous ici, où notre destinée fatale, cachée dans le trou de l’ogre, peut s’élancer sur nous et nous saisir ? Fuyons ! nos larmes ne sont pas encore prêtes à couler.

MALCOLM. — Ni notre chagrin sur le pied d’agir.

BANQUO. — Secourez lady Macbeth (on emporte lady Macbeth), et lorsque nous aurons couvert la nudité de notre frêle nature, qui souffre ainsi exposée, rassemblons-nous et faisons des recherches sur cette sanglante action, afin de la connaître plus à fond. Nous sommes ébranlés par les terreurs et les doutes, mais je suis dans la puissante main de Dieu, et de là je combattrai les desseins secrets d’une méchanceté perfide.

MACBETH. — Et moi aussi.

TOUS. — Et nous tous de même.

MACBETH. — Allons promptement nous vêtir tous d’une manière convenable, afin de nous rassembler ensuite dans la salle.

TOUS. — Volontiers.

(Ils sortent.)

MALCOLM. — Que voulez-vous faire ? Ne nous associons point avec eux. Montrer une douleur qu’on ne sent pas est un rôle aisé pour l’homme faux.—Je me retire en Angleterre.

DONALBAIN. — Et moi en Irlande. En séparant nos fortunes nous serons plus en sûreté. Ici je vois des poignards dans les sourires, et celui qui est le plus près par le sang est le plus prêt à le verser.

MALCOLM. — Le trait meurtrier qui a été lancé n’a pas encore atteint son but ; et le parti le plus sûr pour nous est d’en éviter le coup. Ainsi donc, à cheval, et ne nous inquiétons pas de prendre congé : tirons-nous d’abord