Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 2.djvu/341

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dame ? Je ne vous connais pas. Il n’y a pas deux heures que je suis dans Éphèse, aussi étranger à votre ville qu’à vos discours ; et j’ai beau employer tout mon esprit pour étudier chacune de vos paroles, je ne puis comprendre un seul mot de ce que vous me dites.

LUCIANA.—Fi ! mon frère ; comme le monde est changé pour vous ! Quand donc avez-vous jamais traité ainsi ma sœur ? Elle vous a envoyé chercher par Dromio pour dîner.

ANTIPHOLUS.—Par Dromio ?

DROMIO.—Par moi ?

ADRIANA.—Par toi. Et voici la réponse que tu m’as rapportée, qu’il t’avait souffleté et qu’en te battant il avait renié ma maison pour la sienne, et moi pour sa femme.

ANTIPHOLUS, à Dromio.—Avez-vous parlé à cette dame ? Quel est donc le nœud et le but de cette intrigue ?

DROMIO.—Moi, monsieur ! je ne l’ai jamais vue jusqu’à ce moment.

ANTIPHOLUS.—Coquin, tu mens : car tu m’as répété sur la place les propres paroles qu’elle vient de dire.

DROMIO.—Jamais je ne lui ai parlé de ma vie.

ANTIPHOLUS.—Comment se fait-il donc qu’elle nous appelle ainsi par nos noms, à moins que ce ne soit par inspiration ?

ADRIANA.—Qu’il sied mal à votre gravité de feindre si grossièrement, de concert avec votre esclave, et de l’exciter à me contrarier ! Je veux bien que vous ayez le droit de me négliger ; mais n’aggravez pas cet outrage par le mépris.—Allons, je vais m’attacher à ton bras : tu es l’ormeau, mon mari, et moi je suis la vigne13, dont la faiblesse mariée à ta force partage ta vigueur : si quelque objet te détache de moi, ce ne peut être qu’une vile plante, un lierre usurpateur, ou une mousse inutile, qui, faute d’être élaguée, pénètre dans ta sève, l’infecte et vit aux dépens de ton honneur.

Niote 13 : (retour)

Lenta qui velut asoitas, Vitis implicat arbores, Implicabitur in tuum Complexum…..