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ACTE III, SCÈNE III.

funestes. Je me sens de la répugnance à sortir de ma maison ; cependant quelque chose m’entraîne.

(Entrent des citoyens.)

premier citoyen. — Quel est votre nom ?

second citoyen. — Où allez-vous ?

troisième citoyen. — Où demeurez-vous ?

quatrième citoyen. — Êtes-vous marié ou garçon ?

second citoyen. — Répondez sans détour à chacun de nous.

premier citoyen. — Oui, et brièvement.

quatrième citoyen. — Oui, et sagement.

troisième citoyen. — Oui, et véridiquement ; vous ferez bien.

cinna. — Quel est mon nom, où je vais, où je demeure, si je suis marié ou garçon ? Eh bien pour répondre à chacun de vous sans détour, brièvement, véridiquement et sagement, je dis sagement : Je suis garçon.

second citoyen. — Autant dire : Il n’y a que les imbéciles qui se marient. Vous pourriez bien être rossé pour ça, j’en ai peur. Poursuivez et sans détour.

cinna. — Sans détour ? J’allais aux funérailles de César.

premier citoyen. — Comme ami, ou comme ennemi ?

cinna. — Comme ami.

second citoyen. — C’est répondre sans détour.

quatrième citoyen. — Et votre demeure ? Brièvement.

cinna. — Brièvement ? Je demeure près du Capitole.

troisième citoyen. — Et votre nom, s’il vous plaît ? véridiquement.

cinna. — Véridiquement ? Mon nom est Cinna.

premier citoyen. — Mettons-le en pièces : c’est un conspirateur.

cinna. — Je suis Cinna le poëte, je suis Cinna le poëte.

quatrième citoyen. — Mettons-le en pièces pour ses mauvais vers mettons-le en pièces pour ses mauvais vers.

cinna. — Je ne suis point Cinna le conspirateur.

quatrième citoyen. — N’importe, il se nomme Cinna ; arrachons seulement son nom de son cœur, et puis nous le laisserons aller.