Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 1.djvu/377

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cher et monta de force dans le lit de la belle comtesse Nottingham, femme du grand amiral d’Angleterre. « Je vous déclare sur ma parole, ajoute sir John Harrington, à vous qui ne bavarderez pas (décidément cet Harrington est homme de précaution !) que la frayeur de la conspiration des poudres nous est passée de l’esprit et que nous vivons comme si le diable voulait que chacun de nous se fît sauter par les orgies, les excès et les débauches. »

Tel était le spectacle présenté au monde par la cour de Jacques Ier, de ce roi que l’histoire a appelé le Salomon du Nord. C’est par ces monstruosités que ce prince, fils de Marie Stuart et père de Charles Ier, préparait l’échafaud de son fils après avoir laissé faire l’échafaud de sa mère. Ah ! quel avertissement prophétique le poëte donnait au roi quand il lui disait par la voix d’Hamlet :

C’est une coutume.
Qu’il est plus honorable de violer que d’observer.
Ces débauches abrutissantes nous font, de l’orient à l’occident,
Bafouer et mépriser par les autres nations
Qui nous traitent d’ivrognes et souillent notre nom
De l’épithète de pourceaux.

(7) Toutes les éditions originales attribuent ce vers fameux au spectre ; mais une tradition de la scène anglaise le donne à Hamlet, et Garrick le disait toujours, quand il jouait ce dernier rôle.

(8) Il y a ici une différence fort importante entre la version du premier Hamlet et celle du second. Dans l’édition de 1603, quand Hamlet demande à Gilderstone pourquoi les tragédiens de la cité sont devenus comédiens ambulants, Gilderstone répond : « Ma foi, monseigneur, c’est la nouveauté qui l’emporte ; car le public qui d’habitude allait les voir, a pris en goût les représentations particulières et les plaisanteries des enfants. » Dans l’édition de 1604, à cette même question d’Hamlet, Guildenstern répond : « Une résidence fixe leur est interdite en conséquence de la dernière innovation. » Dans le premier cas, la raison alléguée est simplement un changement dans le goût du public qui préfère les représentations données par les enfants aux représentations données par les comédiens ; dans le second, la raison alléguée est une interdiction causée par une innovation récente. Nous pensons qu’il y a ici deux allusions distinctes à deux époques diverses de l’histoire du théâtre anglais. Pour bien faire saisir la différence entre les deux allusions, il faut rappeler les faits. En 1584, les enfants de chœur de la chapelle de Saint--