Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 1.djvu/6

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nouvelle lui répugne. Ces locutions insolites, ces tours inattendus, cette irruption sauvage de figures inconnues, tout cela, c’est de l’invasion. Que va devenir sa littérature à elle ? Quelle idée a-t-on de venir lui mêler dans le sang cette substance des autres peuples ? C’est de la poésie en excès. Il y a là abus d’images, profusion de métaphores, violation des frontières, introduction forcée du goût cosmopolite dans le goût local. Est-ce grec ? c’est grossier. Est-ce anglais ? c’est barbare. Apreté ici, âcreté là. Et, si intelligente que soit la nation qu’on veut enrichir, elle s’indigne. Elle hait cette nourriture. Elle boit de force, avec colère, Jupiter enfant recrachait le lait de la chèvre divine.

Ceci a été vrai en France pour Homère, et encore plus vrai pour Shakespeare.

Au dix-septième siècle, à propos de madame Dacier, on posa la question : Faut-il traduire Homère ? L’abbé Terrasson, tout net, répondit non. La Mothe fit mieux ; il refit l’Iliade. Ce La Mothe était un homme d’esprit qui était