Aller au contenu

Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/253

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
249
SCÈNE VII.

Au courrier.

— Suis-le, car il aura peut-être besoin — de quelque courrier entre moi et les pairs, — et ce sera toi.

LE COURRIER.

De grand cœur, mon suzerain.

Il sort.
LE ROI JEAN.

— Ma mère morte !

Hubert rentre.
HUBERT.

— Milord, on dit que cinq lunes ont été vues cette nuit, — quatre fixes, et la cinquième tourbillonnant autour — des quatre autres dans un merveilleux mouvement.

LE ROI JEAN.

— Cinq lunes ?

HUBERT.

Les vieillards et les matrones vont dans les rues, — faisant là-dessus d’inquiétantes prophéties ; — la mort du jeune Arthur est dans toutes les bouches. — En causant de lui, tous secouent la tête, — et se chuchotent à l’oreille : — celui qui parle serre le poignet de son auditeur, — tandis que celui qui écoute prend un air effaré, — fronçant les sourcils, hochant la tête, roulant les yeux. — J’ai vu un forgeron s’arrêter ainsi avec son marteau, — tandis que son fer refroidissait sur l’enclume, — pour avaler, bouche béante, le rapport d’un tailleur — qui, ses ciseaux et sa mesure à la main, — debout dans des pantoufles que son vif empressement — lui avait fait chausser de travers, — parlait de milliers de Français belliqueux — rangés déjà en bataille dans le Kent. — Un autre artisan, maigre et pas lavé, — est venu couper son récit, et parler de la mort d’Arthur.