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SCÈNE IV.
Ah ! mes maîtres, réfléchissez : celui qui vous a poussés — à faire cette action vous haïra pour l’avoir faite.
DEUXIÈME ASSASSIN.

— Que faut-il faire ?

CLARENCE.

Vous laisser fléchir, et sauver vos âmes ! — Qui de vous, s’il était le fils d’un prince, — privé de sa liberté, comme je le suis maintenant, — voyant venir à lui deux meurtriers tels que vous, — n’implorerait pas la vie ? — Comme vous la mendieriez, — si vous étiez dans ma détresse !

PREMIER ASSASSIN.

— Nous laisser fléchir ? ce serait lâche et digne d’une femme.

CLARENCE.

— Ne pas se laisser fléchir est bestial, sauvage, diabolique.

Au second assassin.

— Mon ami, je surprends de la pitié dans tes regards. — Oh ! si tes yeux ne sont pas trompeurs, — range-toi de mon côté et implore pour moi. — Un prince qui mendie, quel mendiant n’en aurait pas pitié ?

SECOND ASSASSIN.

— Détournez la tête, milord.

PREMIER ASSASSIN.

— Tiens, et tiens !

Il poignarde Clarence.

Si cela ne suffit pas, — je vais te noyer dans le tonneau de Malvoisie, là au fond.

Il sort en entraînant le corps.
DEUXIÈME ASSASSIN.

— Action sanglante et désespérément dépêchée ! — Que je voudrais, comme Pilate, me laver les mains — de ce lamentable et criminel assassinat !