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SCÈNE XVIII.
ta fin sera sanglante : — l’infamie qui a servi ta vie accompagnera ta mort !
Elle sort.
LA REINE ÉLISABETH.

— J’ai bien plus de raisons qu’elle, mais bien moins de force pour te maudire ; — je ne puis que dire amen !

Elle s’éloigne.
RICHARD.

— Arrêtez, madame, j’ai un mot à vous dire.

LA REINE ÉLISABETH.

— Je n’ai plus pour toi de fils de sang royal — à assassiner. Quant à mes filles, Richard, — ce seront des nonnes en prières, et non des reines en pleurs. — Ainsi ne vise pas à frapper leurs vies.

RICHARD.

— Vous avez une fille appelée Élisabeth, — vertueuse et belle, royalement gracieuse.

LA REINE ÉLISABETH.

— Doit-elle donc mourir pour cela ? Oh ! laisse-la vivre, — et je corromprai ses mœurs, je souillerai sa beauté ; — je me calomnierai moi-même, comme infidèle au lit d’Édouard, — et je jetterai sur elle le voile de l’infamie, — pourvu qu’elle puisse vivre hors de l’atteinte du meurtre sanglant ! — J’avouerai qu’elle n’est pas fille d’Édouard !

RICHARD.

— N’outragez pas sa naissance : elle est de sang royal.

LA REINE ÉLISABETH.

— Pour sauver sa vie, je dirai qu’elle n’en est pas.

RICHARD.

— Sa naissance est la plus sûre garantie de sa vie.

LA REINE ÉLISABETH.

— Ses frères sont morts de cette garantie-là.