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RICHARD III.
Ah ! mon cœur t’est bien reconnaissant de cet amour-là !
RICHARD.

— Ne soyez pas si prompte à mal interpréter ma pensée. — J’aime votre fille de toute mon âme, — et je désire la faire reine d’Angleterre.

LA REINE ÉLISABETH.

— Comment ? Qui veux-tu lui donner pour roi ?

RICHARD.

— Eh bien, celui qui la fera reine. Quel autre pourrait-ce être ?

LA REINE ÉLISABETH.

— Toi !

RICHARD.

Moi-même : qu’en pensez-vous, madame ?

LA REINE ÉLISABETH.

— Comment pourrais-tu donc lui faire ta cour ?

RICHARD.

C’est ce que je voudrais apprendre de vous, — qui connaissez mieux que personne son humeur.

LA REINE ÉLISABETH.

— Tu voudrais l’apprendre de moi ?

RICHARD.

Madame, de tout mon cœur.

LA REINE ÉLISABETH.

— Envoie-lui, par l’homme qui a tué ses frères, — deux cœurs sanglants où seront gravés — ces noms, Édouard et York : sur quoi, peut-être, elle pleurera. — Alors présente-lui un mouchoir pareil à celui que Marguerite — offrit à ton père, plongé dans le sang de Rutland : — dis-lui que celui-là a essuyé — la sève vermeille du corps de son doux frère, — et engage-la à s’en servir pour sécher les larmes de ses yeux. — Si ces séductions ne la décident pas à t’aimer, — envoie-lui dans une