Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/56

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levis qui domine un fossé profond, engageons-nous dans ce chemin de ronde resserré entre de hautes murailles, et montons dans cette tourelle qui défend la seconde porte. Entendez-vous comme des cris étouffés qui partent d’un cachot du premier étage ? Ce sont les enfants d’Édouard qui se débattent. Thomas Morus va vous conter cette lugubre histoire.

« Le roi Richard, s’étant mis dans l’idée que, tant que ses neveux vivraient, il ne serait jamais regardé comme le possesseur légitime de la couronne, songea, en conséquence, à se débarrasser d’eux sans délai, comme si le meurtre de ses parents pouvait consacrer sa cause et le faire agréer pour roi. Sur ce, il envoya John Green, en qui il avait une confiance particulière, à sir Robert Brakenbury, constable de la Tour, avec une lettre requérant sir Robert de mettre à mort les deux enfants par tous les moyens possibles. Ce John Green fit sa commission auprès de Brakenbury, après s’être agenouillé devant Notre-Dame de la Tour : celui-ci répondit nettement que jamais il ne consentirait à les mettre à mort sur un pareil ordre. Green se rendit à Warwick pour rapporter cette réponse au roi Richard qui était encore en voyage ; le roi en fut si profondément mécontent que la même nuit, il dit à un page qui était son confident : « Ah ! à quel homme me fierai-je ? Ceux dont j’ai moi-même fait la fortune, ceux que je regardais comme des serviteurs sûrs, ceux-là même me manquent et se refusent, même sur mon ordre, à rien faire pour moi. » — « Seigneur, répondit le page, il y a un homme couché dans l’antichambre qui, j’ose le dire, fera certainement la volonté de votre grâce : il faudrait que la chose fût bien difficile pour qu’il refusât. » Il voulait parler de James Tyrrel…

» James Tyrrel imagina de tuer les enfants dans leur lit, sans qu’il y eût de sang répandu : pour l’exécution,