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INTRODUCTION.

haute leçon politique en même temps qu’une grande œuvre littéraire.

Dans ce tableau, toujours si instructif, où le poëte nous représente la monarchie aux prises avec l’infirmité humaine, Shakespeare n’a rien exagéré. En voulez-vous une preuve frappante ? Transférez le drame qui contient le Conte d’hiver du monde idéal dans le monde réel ; transportez-en les principaux personnages du théâtre dans l’histoire, et changez les noms : Léonte, ce despote qui, sur un soupçon, instruit le procès de sa femme, Léonte, c’est Henry VIII ! Hermione, cette princesse qui, devant le tribunal présidé par son mari, repousse si fièrement et si humblement l’accusation d’adultère, Hermione, c’est Anne de Boleyn ! Et quant à Perdita, quant à cette pauvre petite fille arrachée au berceau royal et déclarée bâtarde, laissez-la grandir, et puis mettez-lui au front cette double couronne : la reconnaissez-vous, à présent ? Elle est la majesté terrestre devant qui Shakespeare lui-même plie le genou, car elle s’appelle Élisabeth, par la grâce de Dieu, reine d’Angleterre et d’Irlande !


Hauteville-House, mai 1859.