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LES JALOUX.

çant vers Posthumus : « Du calme, monseigneur ! écoutez ! » Mais l’autre, fou de douleur, ne la devine pas sous ces vêtements ; cette interruption lui fait l’effet d’une insulte, et il repousse durement le petit page. Sous ce coup imprévu, Imogene tombe défaillante. Pisanio, toujours le premier à porter secours, se précipite vers le page étendu sans mouvement ; il se penche et la reconnaît : « monseigneur ! crie-t-il à Posthumus, vous n’avez jamais tué Imogène qu’en ce moment ! » Heureusement, Imogène est trop clémente pour se laisser mourir si vite ; retenue par son mari qui l’étreint dans ses bras, elle résiste à la séduction de la tombe, à l’attraction du dernier sommeil ; elle rouvre les yeux ; elle consent à vivre ! Figurez-vous, confondus dans la même extase, la joie de Claudio voyant ressusciter Héro et le bonheur de Léonte sentant son Hermione palpiter dans la statue de marbre, et vous aurez une idée du ravissement de Posthumus embrassant Imogène. Les remords de Claudio et de Léonte, Posthumus les éprouve : comme eux il a sali de ses soupçons la blanche pudeur d’Imogène ; comme eux il a été coupable du crime de lèse-chasteté conjugale. Mais Imogène a le droit de grâce, comme Héro et comme Hermione ; elle en use ainsi qu’elles, et elle absout son jaloux d’un sourire.

C’est alors que, pour ajouter à l’émotion générale, Pisanio raconte le péril auquel la princesse a échappé. Cloten est allé à la poursuite d’Imogène, méditant un odieux attentat. Ce qu’il est devenu, on l’ignore. — Je l’ai tué, dit fièrement Guidérius. — Nouveau coup de théâtre. Cymbeline supplie le jeune imprudent de rétracter ce qu’il vient de dire ; autrement, malgré tous les services rendus par celui-ci, le roi devra châtier le meurtrier du fils de la reine. Malgré cette menace, Guidérius s’obstine à la franchise ; sur l’ordre de Cymbeline, il va