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INTRODUCTION.

Conseillés par un pareil maître, soutenus par une pareille œuvre, les plus faibles de la troupe durent se sentir inspirés. Quant à Richard Burbage, qui créait le rôle principal, nous le savons, il fut sublime. Ce Frédérick du théâtre shakespearien, ce comédien si multiple et si varié qui avait créé avec tant d’éclat Hamlet et Roméo, Henry IV et Shylock, se surpassa lui-même dans Othello. L’émotion qu’il y produisit fut si grande que le souvenir en retentit encore dans les chants populaires. Citons ici une élégie touchante composée en 1619 et inspirée par la mort du grand acteur :


No more young Hamlet, though but scant of breath,
Shall cry revenge for is dear father’s death.
Poor Romeo never more shall tears beget
For Juliet’s love and cruel Capulet.
Harry shall not be seen as kinp or prince.
They died with thee, dear Dick
Not to revive again.
Tyrant Macbeth with unwashed bloody hand
We vainly now may hope to understand.
Brutus and Marcius hanceforth must be dumb
For ne’er thy like upon our stage shall come…
And his whole action he would change with ease
From ancient Lear to youthful Pericles.
But let me not forget one chiefest part
Wherein, beyond the rest, he moved the heart,
The grieved Moor, made jealous by a slave,
Who sent his wife to fill a timeless grave,
Then slew himself upon the bloody bed.
All these and many more, with him are dead !

« Nous n’entendrons plus le jeune Hamlet, malgré son haleine courte, crier vengeance pour la mort de son père chéri. Le pauvre Roméo ne versera plus de pleurs pour l’amour de Juliette et la cruauté de Capulet. Henry ne paraîtra plus ni comme roi, ni comme prince. Ils sont morts avec toi, cher Richard, pour ne jamais revivre. En vain désormais pourrons-nous espérer comprendre le