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ANTOINE ET CLÉOPATRE.
nas, ces fameux pirates, — ont asservi la mer qu’ils sillonnent et lacèrent — avec des quilles de toute forme. Ils font en Italie — maintes chaudes incursions. Les riverains de la mer — blêmissent rien que d’y penser, et la jeunesse exaltée se révolte. — Nul vaisseau ne peut se hasarder sans être aussitôt — pris qu’aperçu : et le nom de Pompée fait plus de ravages — que n’en feraient ses forces opposées aux nôtres.
CÉSAR.

Antoine, — laisse-là tes lascives orgies. Naguère, quand — tu fus chassé de Modène, où tu avais tué — les consuls Hirtius et Pansa, la famine — marcha sur tes talons (5) : tu la combattis, — bien qu’élevé délicatement, avec plus de patience — qu’un sauvage. On te vit boire — l’urine des chevaux et cette lie dorée des mares — qui faisait renâcler les bêtes. Ton palais ne dédaignait pas — le fruit le plus âpre du buisson le plus grossier. — Comme le cerf alors que la neige couvre les pâturages, — tu broutais même l’écorce des arbres. Sur les Alpes, — à ce qu’on rapporte, tu mangeas d’une chair étrange — que plusieurs n’avaient pu voir sans mourir. Et tout cela — (souvenir aujourd’hui blessant pour ton honneur !) — fut supporté si héroïquement que ta joue — n’en maigrit même pas !

LÉPIDE.

Pitoyable déchéance !

CÉSAR.

— Puissent ses remords le ramener vite — à Rome ! Il est temps que tous deux — nous nous montrions dans la plaine ; à cet effet, — assemblons immédiatement le conseil. Pompée — se renforce de notre inaction.

LÉPIDE.

Demain, César, — je serai en mesure de vous indiquer