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SCÈNE VI.

HÉLÈNE, au quatrième seigneur.

— Vous êtes trop jeune, trop heureux et trop noble — pour vouloir un fils de mon sang.

LE QUATRIÈME SEIGNEUR.

— Charmante, je ne pense pas ainsi. —

LAFEU, montrant Bertrand.

Il reste encore une bonne grappe… Je suis bien sûr que le père de celui-là buvait du vin ; mais, s’il n’est pas un âne, lui, je suis un jouvenceau de quatorze ans : je le connais déjà.

HÉLÈNE, à Bertrand.

— Je n’ose pas dire que je vous prends, mais je me livre, — pour vous servir toute ma vie, — à votre souverain pouvoir… Voilà l’homme !

LE ROI.

— Allons, jeune Bertrand, prends-la ; — elle est ta femme.

BERTRAND.

— Ma femme, Sire ! j’en supplie Votre Altesse, — qu’elle me permette, dans cette affaire, — de m’en rapporter à mes propres yeux.

LE ROI.

Est-ce que tu ne sais pas, Bertrand, — ce qu’elle a fait pour moi ?

BERTRAND.

Oui, mon bon seigneur ; — mais je ne crois pas savoir pourquoi je dois l’épouser.

LE ROI.

— Tu sais qu’elle m’a fait lever de mon lit de douleurs.

BERTRAND.

— Faut-il donc, monseigneur, qu’elle me fasse descendre — parce qu’elle vous a fait lever ! Je la connais bien ; — elle a reçu son éducation aux frais de mon père : — la fille d’un pauvre médecin, ma femme !… que plutôt un opprobre — éternel me dégrade !