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TOUT EST BIEN QUI FINIT BIEN.

DEUXIÈME SEIGNEUR.

Il a corrompu ici, à Florence, une jeune dame du plus chaste renom, et cette nuit il assouvit sa passion par la spoliation de son honneur ; il lui a donné son anneau héréditaire, et il se croit le plus fortuné des hommes par cet impur compromis.

PREMIER SEIGNEUR.

Ah ! Dieu nous garde de nos propres révoltes ! Quand nous sommes nous-mêmes, que sommes-nous !

DEUXIÈME SEIGNEUR.

Des traîtres à nous-mêmes. Et comme dans le cours ordinaire des complots, nous voyons toujours les conspirateurs s’entretenir de leurs espérances jusqu’à ce qu’ils atteignent leur but abhoré, lui, de même, lui qui dans cette action conspire contre sa propre noblesse, il laisse déborder son secret.

PREMIER SEIGNEUR.

N’y a-t-il pas en nous une arrière-pensée bien damnable à trompetter ainsi nos intentions illégitimes ?… Alors nous n’aurons pas sa compagnie ce soir ?

DEUXIÈME SEIGNEUR.

Ce ne sera qu’après minuit ; car il est rationné à une heure fixe.

PREMIER SEIGNEUR.

Et cette heure approche rapidement… Pourtant j’aurais été bien aise qu’il assistât à la dissection de son compagnon. Il aurait pu ainsi avoir la mesure de son propre jugement, qui a apprécié si haut ce héros de faux aloi.

DEUXIÈME SEIGNEUR.

Nous ne nous occuperons pas de cet homme avant que le comte arrive ; car sa présence doit être le crève-cœur du misérable.

PREMIER SEIGNEUR.

En attendant, que savez-vous de la guerre ?