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LA SAUVAGE APPRIVOISÉE.
de mes études, — m’appliquer à la vertu et à cette partie de la philosophie — qui traite du bonheur — que la vertu procure spécialement. — Dis-moi ta pensée, car j’ai quitté Pise, — et je suis venu à Padoue comme un homme qui quitte — une mare peu profonde pour plonger dans un océan — et tâcher d’y éteindre sa soif ardente.
TRANIO.

Mi perdonate, mon gentil maître ; — je partage en tout vos sentiments ; — heureux que vous persistiez ainsi dans votre résolution — d’aspirer les douceurs de la douce philosophie. — Seulement, mon bon maître, — tout en admirant — la vertu et la discipline morale, — ne devenons pas, je vous prie, des stoïques et des bûches. — Ne soyons pas tellement dévots aux préceptes d’Aristote, — qu’Ovide soit un proscrit à jamais renié par nous ! — Parlez logique avec les connaissances que vous avez, — et pratiquez la rhétorique dans votre causerie familière, — ayez recours à la musique et à la poésie pour vous inspirer ; — quant aux mathématiques et à la métaphysique, — prenez-en ce que votre estomac pourra en digérer ; — nul profit à la leçon prise sans plaisir. — En un mot, monsieur, choisissez l’étude la plus attrayante pour vous.

LUCENTIO.

— Grand merci, Tranio, de cet excellent avis. — Ah ! Biondello, que n’es-tu déjà sur ce rivage ! — Nous pourrions prendre immédiatement toutes nos dispositions, — et nous loger de manière à recevoir dignement — les amis que nous ne tarderons pas à trouver dans Padoue. — Mais arrêtons un peu : quelle est cette compagnie ?

TRANIO.

— Mon maître, sans doute quelque procession pour fêter notre arrivée en ville.