Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 10.djvu/174

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
170
MESURE POUR MESURE.

lucio.

Allons, monsieur, je sais ce que je sais.

le duc.

J’ai peine à le croire, puisque vous ne savez pas ce que vous dites. Mais si jamais le duc revient (comme nous le demandons dans nos prières), c’est devant lui, je vous préviens, que vous me répondrez de vos paroles. Si c’est la vérité que vous avez dite, vous aurez le courage de la soutenir. Je serai obligé de vous faire sommation : votre nom, je vous prie ?

lucio.

Monsieur, mon nom est Lucio ; je suis bien connu du duc.

le duc.

Il vous connaîtra mieux encore, monsieur, s’il m’est donné de vivre pour vous exposer.

lucio.

Je ne vous crains pas.

le duc.

Oh ! vous espérez que le duc ne reviendra plus, ou vous me croyez un trop impuissant adversaire. Le fait est que je ne puis pas vous faire grand mal ; vous jurerez n’avoir rien dit.

lucio.

Je veux être pendu si je le jure : tu te trompes sur mon compte, moine. Mais ne parlons plus de ça. Peux-tu me dire si Claudio meurt demain, oui ou non ?

le duc.

Pourquoi mourrait-il, monsieur ?

lucio.

Pourquoi ? pour avoir rempli une bouteille au moyen d’un entonnoir. Je voudrais que le duc dont nous parlons fût de retour. Ce ministre impuissant dépeuplera la pro-