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INTRODUCTION.

Dans cette œuvre misérable, qui dut sa longue popularité à la verve bouffonne du baladin Tarleton, sir John Oldcastle répond au petit nom de Jockey. Il compose avec trois autres chenapans, Ned, Gadshill et Tom, une bande de voleurs qui a pour chef le prince de Galles et dont le quartier général est la taverne, je devrais dire la caverne d’Eastcheap. Au moment où l’action commence, la bande vient de dévaliser les receveurs du roi sur une grande route, et sir John a filouté pour sa part une somme de cent livres. Le prince le félicite de cette prise, et emmène les bandits au cabaret pour y boire l’argent volé. Là tous de se soûler consciencieusement. Au bout d’une heure, une querelle éclate ; les pots, devenus projectiles, se brisent contre les murailles ; les épées reluisent. La garde survient au milieu de l’estocade et arrête quelques-uns des ferrailleurs, y compris le prince de Galles. Son Altesse, n’y allant pas de main morte, soufflette le lord grand juge qui a refusé de relâcher le prisonnier Gadshill, et est elle-même envoyée à la prison de Fleet-Street. Mais grâce à sa haute influence, Harry est bientôt mis en liberté ; et, sans transition, nous le retrouvons causant, en compagnie d’Oldcastle et de Ned, de ses projets d’héritier présomptif : « Écoutez, messieurs, quand je serai roi, nous n’aurons plus de prison, plus de gibet, plus de fouet ; si le vieux roi mon père était mort, nous serions tous rois. » — « C’est un bon vieux, réplique le goguenard Jockey, Dieu veuille l’appeler à lui d’autant plus vite ! » La nouvelle de la maladie du roi exauce tout à coup ce vœu édifiant. Le prince, pressé d’hériter, court auprès de son père mourant qui lui reproche amèrement ses folies ; et ce sermon de quelques lignes suffit pour convertir le royal enfant prodigue. Son Altesse fait son mea culpa, promet d’être sage et jure d’abandonner « ses compagnons extravagants et réprouvés. » Henry IV