Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 15.djvu/160

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
160
VÉNUS ET ADONIS.

XXXIV

» Es-tu donc endurci ? es-tu de roche ? es-tu d’acier ? Non, tu es plus dur que la roche, car la pierre s’attendrit à la pluie. Se peut-il que tu sois fils de la femme, et que tu ne sentes pas ce que c’est que d’aimer et quel tourment c’est de ne pas être aimé ! Oh ! si ta mère avait eu un cœur aussi dur, elle ne t’aurait pas mis au monde, elle serait morte stérile !

XXXV

» Qui suis-je que tu me méprises ainsi ? Quel grand danger y a-t-il dans ma supplique ? Quel mal ferait à tes lèvres un pauvre baiser ? Parle, doux enfant, mais parle un doux langage, ou reste muet. Donne-moi un baiser, je te le rendrai, avec un de plus pour les intérêts, si tu en veux deux.

XXXVI

» Fi ! effigie inanimée, pierre froide et insensible, idole peinte, image inerte et morte, statue qui ne plais qu’à l’œil, être qui ressembles à un homme sans être enfant de la femme ! Tu n’es pas un homme, bien que tu en aies le visage, car les hommes sont par instinct prompts aux baisers ! »

XXXVII

Cela dit, l’impatience étouffe sa voix suppliante, et un élan de colère exige d’elle une pause ; ses joues rouges et ses yeux étincelants dardent le ressentiment : elle, qui