Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1873, tome 12.djvu/40

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« Chaque goutte de sang innocent, s’écrie-t-il, est une malédiction, une imprécation vengeresse contre celui dont l’iniquité aiguise les épées qui exterminent ainsi l’éphémère humanité. »

Blood’s guiltless drops
Are every one a woe, a sore complaint,
’Gainst him whose wrongs give edge unto these swords
That make such waste in brief mortality.

La guerre n’est légitime que quand elle a la civilisation pour principe : elle n’est excusable que quand elle a la réconciliation pour dénoûment. Guerre à la France ! soit, mais à la condition que cette guerre se terminera, non par l’armistice de la rancune, mais par la paix de l’amour.

Telle est la consigne que Shakespeare donne d’avance au conquérant. Le poëte s’attache d’ailleurs à lever toutes les objections qui peuvent êtres faites à l’expédition de Henry ; il réfute solennellement les arguments mêmes tirés du droit féodal. Que vient-on opposer au descendant d’Isabelle de France la prétendue loi salique : In terram salicam mulieres ne succedant ? Qu’y a-t-il de commun, je vous prie, entre la terre de France et la terre salique, « située, comme chacun sait, entre la Sahl et l’Elbe ? » Les titres transmis par une femme à Henry V ne sont pas valables ! Mais vous oubliez que le « roi Pepin, qui déposa Chilpéric, se présentait comme héritier et descendant de Bathilde, fille du roi Clotaire ; » vous oubliez que « Hugues Capet se porta pour héritier de dame Lingare, fille de Carloman ; » vous oubliez « que Louis X ne put porter la couronne de France avec une conscience tranquille, qu’après s’être convaincu que sa grand’mère descendait de dame Ermengare, fille de Charles de Lorraine. Il est donc clair comme le soleil d’été que les titres de Pepin, les prétentions de Hugues, la