Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1873, tome 12.djvu/84

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gaillarde : — vous ne sauriez vous y régaler de duchés. — Il vous envoie donc, comme plus conforme à vos goûts, — ce tonneau plein de trésors, et en retour — vous invite à laisser tranquilles les duchés — que vous réclamez. Voilà ce que dit le Dauphin.

LE ROI, à Exeter.

— Quels sont ces trésors, mon oncle ?

exeter.

Des balles de paume, mon suzerain (11).

le roi.

— Nous sommes bien aise que le Dauphin soit avec nous si plaisant ; — nous vous remercions et de ce présent et de vos peines. — Quand nous aurons assorti nos raquettes à ces balles, — nous voulons, par la grâce de Dieu, jouer un coup — à enlever à la volée la couronne de son père. — Dites-lui qu’il a engagé une partie avec un lutteur — qui avec ses chasses bouleversera — toutes les cours de France. Nous comprenons parfaitement — qu’il nous rappelle ainsi notre orageuse jeunesse ; — mais il ne se rend pas compte de l’usage que nous en avons fait. — Nous n’avons jamais fait cas de ce pauvre trône d’Angleterre, — et voilà pourquoi, éloigné de lui, nous nous sommes abandonné — à une effrénée licence. Aussi bien il arrive toujours — qu’on n’est jamais plus gai que hors de chez soi. — Mais dites au Dauphin que j’entends maintenir mon rang, — agir en roi et déployer la voile de ma grandeur, — dès que je serai monté sur mon trône de France. — C’est pour y atteindre que j’ai dépouillé ma majesté, — et remué la terre comme un journalier ; — mais je vais reparaître là avec une gloire si éclatante, — que j’éblouirai tous les yeux de la France — et que ma seule vue aveuglera le Dauphin même ! — Dites aussi à ce prince plaisant que son sarcasme — a transformé ces balles en boulets et que son âme — aura