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HENRY VIII.

pelle le généreux Buckingham, — le miroir de toute courtoisie…

premier gentleman.

Restez là, monsieur, — et vous allez voir le noble déchu dont vous parlez.

deuxième gentleman.

— Rangeons-nous, et regardons-le.


Entre Buckingham, condamné ; des huissiers à verge le précèdent ; la hache est portée devant lui, le tranchant tourné de son côté. Il marche entre deux haies de hallebardiers ; après lui viennent sir Thomas Lovell, sir Nicholas Vaux, sir William Sands, puis la foule.
buckingham.

Vous tous, bonnes gens, — qui êtes venus jusqu’ici par compassion pour moi, — écoutez ce que je vais dire, et puis rentrez chez vous et abandonnez-moi. — J’ai subi aujourd’hui la sentence du traître, — et je dois mourir avec ce nom. Pourtant, le ciel en soit témoin, — si j’ai une conscience, je souhaite qu’elle m’entraîne à l’abîme, — au moment même où tombera la hache, pour peu que j’aie été déloyal ! — Je n’en veux pas à la loi de ma mort : — les présomptions données, elle a fait stricte justice ; — mais ceux qui ont cherché ma mort, je les eusse voulus plus chrétiens. — Quels qu’ils puissent être, je leur pardonne de tout cœur. — Pourtant qu’ils prennent garde de se glorifier dans le mal — et de bâtir leurs méfaits sur les tombeaux des grands ; — car alors mon sang innocent crierait contre eux. — Je n’espère pas dans ce monde un prolongement d’existence, — et je n’en solliciterai pas, quoique le roi ait plus de grâces — que je n’oserais commettre de fautes. Ô vous, êtres rares qui m’aimez — et qui avez le courage de pleurer Buckingham, — vous, ses nobles amis, ses camarades, dont l’adieu — est pour lui la seule amertume, la seule mort, — accompagnez-moi,