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LES JOYEUSES ÉPOUSES DE WINDSOR.

gué.

Et il vous a cherché sans pouvoir vous trouver ?

falstaff.

Vous allez voir. Par bonheur est arrivée une certaine mistress Page ; elle a donné avis de l’approche de Gué ; et, à sa suggestion, la femme de Gué ayant perdu la tête, on m’a emmené dans un panier à linge.

gué.

Un panier à linge !

falstaff.

Oui, un panier à linge. On m’a entassé avec chemises et cotillons sales, chaussettes et bas sales, serviettes crasseuses ; le tout, maître Fontaine, faisait le plus puant mélange d’odeurs nauséabondes qui aient jamais offensé les narines.

gué.

Et combien de temps êtes-vous resté là ?

falstaff.

Eh bien, vous allez voir, maître Fontaine, ce que j’ai souffert afin d’amener cette femme à mal pour votre bien. À peine étais-je empilé dans le panier, que deux coquins de valets de Gué ont été appelés par leur maîtresse pour me transporter comme linge sale au pré Datchet : ils m’ont chargé sur leurs épaules, et ont rencontré à la porte le coquin de jaloux, leur maître, qui leur a demandé une fois ou deux ce qu’ils avaient dans leur panier ; je tremblais de peur que ce coquin de lunatique ne fît une fouille ; mais la destinée, ayant ordonné qu’il serait cocu, a retenu sa main. Bon ! il est parti pour sa perquisition, et moi, je suis parti pour linge sale. Mais remarquez la suite, maître Fontaine. J’ai enduré les angoisses de trois différentes morts : d’abord, l’intolérable frayeur d’être découvert par cet infect bélier jaloux ; puis le tourment d’être courbé, comme une bonne lame de Bilbao, dans la circon-