Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1870, tome 7.djvu/398

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AVERTISSEMENT.


La première édition connue de Jules César est celle de l’in-folio de 1623, et quelques éditeurs modernes ont remarqué, non sans malice à l’égard des honnêtes mânes d’Heminge et de Condell, que cette tragédie avait été imprimée avec une correction que n’offrent malheureusement pas les autres pièces publiées par eux pour la première fois. C’est sans doute au style de la pièce que nous sommes redevables de cette correction, style net, simple, sans surcharge d’ornements comme les pièces de la première période et de la période intermédiaire de Shakespeare, sans concision obscure et effort d’énergie comme les pièces de la dernière période. Ceux qui sur l’examen du style ont cru devoir rapporter cette pièce aux années comprises entre 1600 et 1603 sont à notre avis les plus voisins de la vérité. On peut en effet observer dans ce drame le passage d’un style à un autre ; jamais Shakespeare n’a écrit d’un style à la fois moins imagé et moins dense. La période poétique s’y développe avec une ampleur pleine d’aisance, et la pensée s’y sert de la parole non comme d’une esclave bonne à être torturée jusqu’à ce qu’elle ait satisfait aux plus excentriques exigences de l’imagination, mais comme d’une amie que l’on doit traiter avec déférence et respect ; Shakespeare l’emploie ici plutôt comme un orateur que comme un poète. Jules César en effet porte du commencement à la fin un