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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/257

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l’avons informé du fait, et il a semblé ressentir en l’apprenant une sorte de joie : ces gens sont aux environs de la cour, et je crois qu’ils ont déjà l’ordre de jouer ce soir devant lui.

POLONIUS. — C’est très-vrai, et il m’a prié d’inviter vos majestés à voir et à écouter ce spectacle.

LE ROI. — De tout mon cœur, et je suis fort content d’apprendre qu’il a eu cette fantaisie. Mes bons gentils hommes, stimulez-le encore davantage, et dirigez ses pensées vers ces divertissements-là.

ROSENCRANTZ. — Nous le ferons, Monseigneur. (Sortent Rosencrantz et Guildenstem.)

LE ROI. — Aimable Gertrude, laissez-nous aussi ; car nous avons envoyé secrètement chercher Hamlet, afin qu’il se rencontre en face d’Ophélia, comme si c’était par accident. Son père et moi, légitimes espions, nous nous placerons de façon à voir, sans être vus nous memes ; nous pourrons ainsi franchement juger de leur entrevue, et découvrir d’après sa conduite, si le mal dont il souffre est ou non une peine d’amour.

LA REINE. — Je vais vous obéir : — quant à vous, ma chère Ophélia, je souhaite fort que votre charmante beauté soit l’heureuse cause de l’égarement d’Hamlet : de la sorte j’aurai lieu d’espérer que vos vertus pourront le ramener à son état ordinaire, pour votre plus grand honneur à vous deux.

OPHÉLIA. — Madame, je souhaite que cela se puisse. (Sort la reine.)

POLONIUS. — Ophélia, promenez-vous par là. (Au roi.) Mon gracieux monarque, si vous le voulez bien, nous allons nous cacher, (A Ophélia.) Lisez dans ce livre ; cette occupation apparente donnera une explication plausible à votre solitude. — Nous sommes souvent à blâmer en ceci, — ce n’est que trop prouvé, — qu’en empruntant le visage de la dévotion, et avec de pieuses actions extérieures, nous faisons paraître doux comme sucre le diable lui-même.

LE ROI, à part. — Ô ce n’est que trop vrai ! Quel coup