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Page:Shelley - Œuvres en prose, 1903, trad. Savine.djvu/382

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trouvé partout que froideur et désappointement. Tu demandes ce que c’est que l’amour. C’est cette puissante attraction vers tout ce que nous concevons, craignons, ou espérons en dehors de nous-mêmes, quand nous trouvons dans nos propres pensées l’abîme d’un vide insatiable, et que nous cherchons à éveiller en toutes les choses qui existent quelque chose d’identique à ce que nous ressentons en nous. Si nous raisonnons, nous voudrions être compris; si nous imaginons, nous voudrions voir les enfants de notre cerveau renaître dans le cerveau d’un autre si nous sentons, nous voudrions que les nerfs des autres vibrent à l’unisson de nos nerfs, que les rayons de leurs yeux en un même instant, s’allument, se mêlent et se perdent dans les nôtres, que des lèvres frémissantes, toutes brûlantes du plus pur sang au cœur, ne se posent pas sur des lèvres de glace immobile : voilà ce que c’est que l’amour. C’est le lien, la sanction qui unit l’homme non seulement à l’homme, mais encore à tout ce qui existe. Nous sommes nés dans l’Univers, et il y a en nous quelque chose qui depuis le début de notre vie, aspire de plus en plus vers ce qui lui ressemble. Cela est probablement en rapport avec cette loi de la nature d’après laquelle l'enfant tire le lait du sein maternel ; cependant se développe au fur et à mesure que se développe notre nature. Nous voyons obscurément dans notre substance intellectuelle, une sorte de portrait en miniature de notre être tout entier, mais dépouillé de tout ce que nous condamnons ou méprisons, prototype idéal de tout