Page:Shelley - Œuvres poétiques complètes, t2, 1887, trad. Rabbe.djvu/371

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HELLAS 353 même un Sphinx plus subtil trouverait des énigmes de mort que Thèbes ne connut jamais. Une autre Athènes se lèvera, et aux temps à venir léguera, comme un coucher du soleil aux cieux, la splendeur de son aurore ; et laissera, puisque rien d’aussi beau ne saurait vivre, tout ce que la terre peut recueillir et le ciel peut donner. Saturne et l’Amour sortiront de leur long repos (1), plus brillants et meilleurs que tous ceux qui tombèrent, que le Seul qui s’éleva, que tant d’autres dieux encore debout ; ni l’or, ni le sang ne s’offrent sur leur autel, mais des larmes votives et des fleurs symboliques. Oh ! arrêtez ! la haine et la mort doivent-elles revenir ?

(1) Saturne et l’Amour furent du nombre des divinités d’un état réel ou imaginaire d’innocence et de boniieur. Tous ceux- qui tomljrrent, c’est-à-dire les Dieux de la Grèce, de l’Asie et de l’Égypte ; le Sml (/)fi s’rlei’u, ou Jésus-Christ, à l’apparition de qui les idoles du monde païen furent dépossédées de leur culte ; tant (ranlrcs ciicori’ dchont, c’est à-dire les monstrueux objets de l’idolâtrie de la Chine, de l’Inde, des îles Antarctiques et des tribus indigènes de l’Amérique, tous ces Dieux ont certainement régné sur les entendements humains ensemble ou l’un après l’autre, durant des périodes où nous savons que le mal a triomphé d’une façon prodigieuse, et avec une activité toujours croissante, jusqu’à la renaissance des sciences et des arts. Les Dieux de la Grèce semblent, en vérité, avoir été personnellement plus innocents, quoiqu’on ne puisse pas dire que, sous le rapport de la tempérance et de la chasteté, ils aient donné des exemples aussi édifiants que leur successeur. Le sublime carac- tère humain de Jésus-Christ a été défiguré par l’identification qu’on en a faite avec un pouvoir, qui tentait, trahissait et punis- sait les êtres que sa seule volonté avait appelés à l’existence : et pendant une période de mille ans, l’esprit du plus juste, du plus sage et du plus bienveillant des hommes a été apaisé par les myriades d’hécatombes de ceux qui se rapprochaient le plus de son innocence et de sa sagesse, immolés en sacrifices aggravés encore par l’atrocité et la variété des tortures. Les horreurs des superstitions mexicaines, péruviennes et indiennes sont bien connues. S.