Page:Shelley - Œuvres poétiques complètes, t3, 1887, trad. Rabbe.djvu/39

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due. Ceinte de rafales et de météores, la tempête habite près de l’urne aérienne du Nil, poussant avec de rapides enchantements ces eaux à leur puissante embouchure. Sur la terre d’Égypte, des inondations sont le niveau de la mémoire et ce sont les tiennes, ô Nil ! et tu sais bien que les airs qui soutiennent l’âme, et les coups de vent du mal, et les fruits et les poisons surgissent partout où tu coules. Prends garde, ô homme ! car la science doit toujours être pour toi ce qu’est pour l’Égypte la grande inondation !


OZYMANDIAS (Sonnet)

J’ai rencontré un voyageur venu d’une terre antique qui m’a dit : « Deux jambes de pierre vastes et sans tronc se dressent dans le désert. Près d’elles, sur le sable, à moitié enfoncé, gît un visage brisé, dont le froncement de sourcil et la lèvre plissée, et le ricanement de froid commandement disent que le sculpteur sut bien lire ces passions qui survivent encore, empreintes sur ces choses sans vie, à la main qui les imita et au cœur qui les nourrit. Et sur le piédestal apparaissent ces mots : Mon nom est Ozymandias, roi des rois ; regardez mes œuvres, ô puissants, et désespérez ! Il ne reste rien à côté. Autour de la ruine de ce colossal débris, sans limites et nus, les sables étendent au loin leur niveau solitaire. »