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Page:Sicard - Le Jardin du Silence et la Ville du Roy, 1913.djvu/30

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Autour des pins dressés parmi les rochers blancs.
Je ne tiens que mon cœur et votre éloignement.
Vous ne m’entendez pas, ce soir. Vous êtes toute
À vous aimer, à vous suffire. Vers la route
Vous n’entrouvrirez pas vos fenêtres, pour voir
Passer ce voyageur, sans but et sans pouvoir,
Qui foule du gravier, de l’herbe et du mystère.
Un distrait égoïsme attise vos paupières ;
Vos yeux n’ont des éclats que pour le salon vert
Où le divan n’attend ni René ni Werther.
Votre esprit est léger entre vos mains qui flânent ;
Sur le tapis profond, vos babouches persanes
Parcourent des dessins pour s’y mieux assortir.
Que vous fait-il que je sois triste ! On va servir
Le thé ; vos doigts déjà dans le sucrier se pressent !
Que vous fait-il que je sois triste, ma maîtresse,
Votre bouche est heureuse au goût du pain grillé !…
J’ai dépassé la bergerie que vous aimiez,
Le parc où le sylvain de pierre n’a plus d’âge,
Le bosquet des cyprès qui domine un village,
Tout ce que vous savez des vignes et des bois,
Tout ce que l’on voit mal lorsque seul on le voit.