Page:Sicard - Le Laurier Noir, 1917.djvu/25

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Entre un entassement de pierre et de charbon,
Un cheval, lourdement, fait rouler un wagon.
Sur les quais, des soldats chantent La Marseillaise.
Comme un gouffre béant et comme une fournaise
La gare, sans lumière, emporte dans la nuit
Les troupes. Les drapeaux, serrés dans leur étui,
Regardent l’horizon qui déploiera leur flamme.
Des enfants accrochés à des jupes de femmes
Fixent de leurs grands yeux la voûte des tunnels.
Une épouse aux flancs lourds interroge le ciel :
« Verra-t-il la moisson que dans mon sein je porte ? »
Un hangar… un fourgon… Un homme ouvre une porte,
Et, dans la nuit, surgit un visage d’acier.
On pousse les canons sur le corps des madriers.
Un tumulte de fer court vers le paysage.
Ô Seigneur, protégez de David le courage
Pour qu’il puisse revoir au retour des combats,
Cette plaine dans l’ombre et ce fils dans ces bras.




Ma fenêtre est ouverte au bord d’un grand silence.
          Je songe à mes amis :
Sur les routes de l’Est leur cortège s’avance…
          Seigneur, suis-je maudit