Page:Sienkiewicz – Hania, traduction Chirol.djvu/144

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fois dans ma vie il m’est arrivé de résister aux impulsions de mon cœur et de ne pas ouvrir mon âme ; en effet, un orgueil inné et tout-puissant, qu’il m’eût fallu terrasser, gelait mon cœur et arrêtait les mots prêts à s’échapper. Chaque fois que cet orgueil m’a gâté mon bonheur, je l’ai maudi, et pourtant je ne sais pas encore lui résister dès le premier moment.

Sélim disait : « J’ai eu pitié de toi » — c’est-à-dire qu’il s’attendrissait sur mon compte, — c’était assez pour clore mes lèvres.

Je gardai le silence. Il me regarda de ses beaux yeux et parla avec un accent de prière et de repentir dans la voix :

— Henri, peut-être l’aimes-tu ? Certes, elle m’a beaucoup plu, mais à présent c’est fini. Si tu veux, je ne lui dirai plus un mot. Peut-être l’aimes-tu déjà ? Qu’as-tu contre moi ?

— Je ne l’aime pas, et je n’ai rien contre