Page:Sienkiewicz – Hania, traduction Chirol.djvu/31

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regarder, de quelque côté que vous fussiez. Mais mon collègue Sélim ne ressemblait pas du tout à ce portrait. Sa mère, avec qui le vieux Davidovicz s’était marié en Crimée, n’était pas une Tatare, mais une Géorgienne, paraît-il ; je ne me souviens pas d’elle, mais je sais qu’on en parlait comme d’une beauté exceptionnelle, et que Sélim lui ressemblait comme deux gouttes d’eau.

Oh ! quel beau garçon qu’était ce Sélim ! Ses yeux possédaient encore un défaut à peine perceptible, mais ce n’étaient pas des yeux tatars : c’étaient de ces grands yeux, noirs, pensifs et mélancoliques, qui distinguent les Géorgiens. Je n’ai rien vu de ma vie de plus beau. Lorsque Sélim demandait quelque chose et regardait quelqu’un, il semblait le pénétrer jusqu’au cœur. Les traits de son visage étaient réguliers, nobles, comme dessinés par un burin d’artiste ; la couleur en était basanée, mais tendre ; les lèvres, un peu saillantes, étaient d’un rouge vif, et