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L’ÉDUCATION DE L’ŒIL

bourgeois du supernaturalisme de ça !… Nous sommes vraiment dans le Bas-Empire du verbe, dans le pataugement de la couleur. »

Et les Goncourt écrivent (la Peinture à l’Exposition de 1855) :

« Delacroix à qui a été refusée la qualité suprême des coloristes, l’harmonie. »

La plupart des critiques, en effet, ne peuvent guère, faute d’éducation technique, se rendre compte de l’accord de deux teintes ou du désaccord de deux lignes. Ils jugent plutôt par le sujet, la tendance, le genre, sans se préoccuper du côté « peintre ». Ils font de la littérature à propos de tableaux, non de la critique d’art. — Citons cette note de Delacroix : « Oculos habent et non vident, veut dire : De la rareté des bons juges en peinture. » Lui qui disait : « Voici plus de trente ans que je suis livré aux bêtes », il avait assez souffert de l’ignorance du public et de la critique pour se rendre bien compte des difficultés que rencontrent les coloristes. Dans son Journal, il écrit :

« Je sais bien que cette qualité de coloriste est plus fâcheuse que recommandable… Il faut des organes plus actifs et une sensibilité plus grande pour distinguer la faute, la discordance, le faux l’apport des lignes et des couleurs. »

Et, sur le même sujet, il écrit à Baudelaire (8 octobre 1861) :

« Ces effets mystérieux de la ligne et de la couleur que ne sentent,