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DE DELACROIX AU NÉO-IMPRESSIONNISME

De Charles Blanc (Grammaire des arts du dessin)  :

« La couleur, soumise à des règles sûres, se peut enseigner comme la musique… C’est pour avoir connu ces lois, pour les avoir étudiées à fond, après les avoir par intuition devinées, qu’Eugène Delacroix a été un des plus grands coloristes des temps modernes.

« La loi des complémentaires une fois connue, avec quelle sûreté va procéder le peintre, soit qu’il veuille pousser à l’éclat des couleurs, soit qu’il veuille tempérer son harmonie. Instruit de cette loi par l’intuition ou l’étude, Eugène Delacroix n’avait garde d’étendre sur sa toile un ton uniforme.

« La hardiesse qu’avait eue Delacroix de sabrer brutalement le torse nu de cette figure avec des hachures d’un vert décidé… »

D’Ernest Chesneau (Introduction à l’œuvre complet d’Eugène Delacroix) :

« Il avait surpris un des secrets que l’on n’enseigne pas dans les écoles et que trop de professeurs ignorent eux-mêmes : c’est que, dans la nature, une teinte qui semble uniforme est formée de la réunion d’une foule de teintes diverses, perceptibles seulement pour l’œil qui sait voir. »

Théophile Silvestre, qui a passé de longues heures dans l’atelier de Delacroix, nous révèle (les Artistes français) ces détails précis sur le mode de travail raisonné et savant auquel le maître, malgré sa fièvre et son impatience, consentait à asservir sa fougueuse inspiration :

« Il était arrivé d’expérience en expérience à un système absolu de couleur que nous allons essayer en abrégé de faire comprendre. Au lieu de simplifier, en les généralisant, les colorations locales, il multipliait les tons à l’infini et les opposait l’un à l’autre pour donner à chacun d’eux une double intensité. Titien lui semblait monotone et