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DE DELACROIX AU NÉO-IMPRESSIONNISME

les multiples colorations viennent pacifier ou exciter ces parties du tableau ; tandis qu’il a peint d’une teinte plate et presque monochrome les chairs, parce que, dans la réalité, elles ont cette apparence. Il n’a pas encore osé y introduire des éléments multicolores non justifiés par la nature. Ce n’est que plus tard qu’il saura dominer la froide exactitude et qu’il ne craindra pas de rehausser de hachures artificielles la teinte des chairs pour obtenir plus d’éclat et plus de lumière.

13. Jamais les trésors de sa palette ne sont épuisés. Il se dégage, peu à peu, du clair-obscur de ses premières œuvres. Un chromatisme plus puissant se répand sur la surface entière de ses toiles ; le noir et les couleurs terreuses disparaissent en même temps que la teinte plate ; des teintes pures et vibrantes les remplacent : sa couleur semble devenir immatérielle. Par l’emploi du mélange optique, il crée des teintes génératrices de lumière. Si un peu plus de clarté dans la galerie d’Apollon ou un peu moins de prudence craintive au Sénat et à la Chambre permettaient d’étudier de près les décorations de Delacroix, on pourrait facilement constater que les teintes les plus fraîches et les plus délicates des chairs sont produites par de grosses hachures vertes et roses juxtaposées et que l’éclat lumineux des ciels est obtenu par un travail analogue. Au recul, ces hachures disparaissent, mais la couleur qui