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C’est dans ce volume charmant des Froufrous, que Lemerre éditait, il y a deux ans, avec son luxe accoutumé, et qui est demeuré sur un rayon choisi de la bibliothèque de tous les vrais lettrés. Car Thilda est avant tout un poète. À la délicatesse des pensées, à la justesse de l’image, elle joint ce sentiment du rythme et cette intuition des sonorités sans lesquels on ne fait pas de vers méritant ce nom. Son imagination, capable de toutes les indépendances, se courbe cependant devant cette règle matérielle, presque unique, de notre prosodie, et dont les impuissants seuls essayent de s’affranchir, qu’on appelle : la rime, — la rime dans sa rigueur harmonieuse. Mais on ne parle des poètes qu’en les citant. Je cite donc. Mais ne croyez pas au moins que le recueil tout entier soit dans cette note mélancolique :

DERNIÈRE VOLONTÉ

J’ai renfermé dans une coffret
Une humble fleur toute fanée,
Et, sur la serrure à secret,
J’ai gravé le mois et l’année.

Le myosotis est la fleur ;
Mais je l’ai tant et tant baisée,
Qu’elle en a perdu sa couleur,
Et que mon âme s’est brisée !

Quand je verrai la mort venir,
Qu’on ouvre le coffret de rose,
Et sur ma lèvre, à jamais close,
Qu’on mette le cher souvenir !