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Page:Silvestre - Contes grassouillets, 1883.djvu/248

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Contes grassouillets.

Ce jeune homme serait-il une de ces natures privilégiées que n’ont point perverties les vices contemporains ? un de ces rares élus qui ne sacrifient pas aux faux dieux de la Frivolité ? L’âme du jeune Éliacin habiterait-elle ce complet de couleur sévère, mais de bon goût ?

— Comme ce pauvre garçon doit s’ennuyer ! dit la belle Jenny mélancoliquement.

— Et pourquoi donc, madame Peterson ? reprit avec sévérité le révérend. Croyez-vous donc que la tempérance soit chose fastidieuse et que la pratique de la sobriété, en toutes choses, n’ait pas ses graves plaisirs ? Ce jeune homme me plaît infiniment ; il me plaît au point que moi, qui m’étais juré de ne pas me mêler à cette foule répugnante, j’en veux faire ma société, et, qui sait ? peut-être mon ami. Peut-être est-il, hélas ! d’un culte dissident et d’une communion déplorable ? N’importe ! Je le convaincrai ! je le convertirai ! Je lui rappellerai l’exemple de l’ânesse de Balaam.

Et, mettant son large chapeau sous son bras, le clergyman s’avança vers l’inconnu qui était en train de regarder la mer avec l’obstination