Page:Silvestre - Histoires gaies, 1895.djvu/122

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dante. J’aimais et mon cœur saigne encore à ce souvenir. Elle s’appelait Naïboula et son père Kamalotutu était un des plus grands chefs de la contrée. Cette haute situation sociale ne l’avait pas infecté de nos préjugés ridicules et ne l’avait pas empêché de conduire lui-même sa fille dans mon lit, ce qu’on n’obtiendrait pas de notre moindre baronnet. Il m’avait même exprimé, par une pantomime pleine de goût, qu’il serait infiniment flatté d’avoir un petit-fils de ma fabrication. Je lui promis d’y tâcher et je tins ma parole. Un plat de mûres, cette Naïboula, mais de mûres savoureuses. Elle était brune comme Toussaint Louverture ou Jean Louis, mais d’un brun infiniment plus agréable. Sous cette ombre naturelle elle avait les traits d’une régularité romaine et sa bouche d’un rouge ardent était comme une flamme d’incendie traversant cette nuit. La douceur de ses yeux révélait le velouté de ses pensées. Ses pieds et ses mains, très petits, étaient d’un dessin vigoureusement délicat. Ajouterai-je que ses hanches avaient un rythme d’amphore et que son ventre, pareil à un lac de jais, était d’un contour le plus ferme du monde ? Amoureuse avec cela, amou-