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sujet du Chou king nous a montré que, quelque atteinte que le vandalisme de Ts’in Che-hoang-ti ait portée à l’ancienne littérature, celle-ci n’a pu cependant sombrer tout entière et d’un seul coup ; il en subsista des parties intactes que Se-ma Ts’ien sut recueillir à l’exclusion des écrits apocryphes que son époque déjà commençait à y mêler. Si d’ailleurs on considère que le Chou king est, parmi les classiques, un de ceux qui ont le plus souffert de la proscription et que d’autres livres, tels que le Che king ou le Tch’oen tsieou, passent pour n’avoir pas subi d’altérations notables, on conclura que, malgré l’édit de l’an 213, il est resté suffisamment de monuments antérieurs à cette date pour justifier l’entreprise de Se-ma Ts’ien et pour faire échapper son oeuvre aux attaques d’un scepticisme trop facile. Puisque nous avons écarté le doute qu’au premier abord on aurait pu élever touchant la valeur des sources des Mémoires historiques, cherchons maintenant quelles sont ces sources et comment Se-ma Ts’ien en fait usage.

Le Chou king ou livre de l’Histoire et le Che king ou livre des Vers passent pour être au nombre des plus vieux monuments de la littérature chinoise. C’est dans les poésies du Che king que les Européens iront de préférence chercher à découvrir quelles ont été les moeurs et les croyances des anciens. Mais il faut un travail personnel pour les en dégager et Se-ma Ts’ien, qui ne prend que des matériaux tout façonnés, fait un usage fort limité de ces chants populaires CXXXVII-1. Il emprunte au


CXXXVII-1. Voici les principales citations que Se-ma Ts’ien fait du Che king :

a) Mémoires historiques, chap. XIV, Che eul tchou heou nien piao, p.1 r° : 周道缺,詩人本之衽席,關雎作。仁義陵遲,鹿鳴刺焉。 « La conduite des Tcheou étant devenue mauvaise, les poètes prirent pour sujet (de leurs chants) les nattes sur lesquelles on se couche ; (l’ode) Koan ts’iu fut composée. La bonté et la justice se corrompirent ; (l’ode) Lou ming le blâma. » L’ode Koan ts’iu est la première de la lre partie du Che king ; on voit que Se-ma Ts’ien y découvre une tendance satirique ; certains