Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/217

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Voici maintenant l’opinion des Talmudistes sur le Paradis, Gan-Éden, et sur l’enfer, Guéhinnam[1]. Puisque les Talmudistes savaient si bien ce qui arrivait des âmes immédiatement après le trépas, il ne valait pas la peine de s’arrêter en si beau chemin. Autant conduire les âmes jusqu’à leur destination et leur demeure définitives. Donc, racontent les Talmudistes, « dans le Paradis, Gan-Éden, il y a de nombreuses gradations, suivant les différents degrés de mérite. À chaque juste est attribuée une demeure d’après son rang. Les pécheurs repentants sont plus haut que les justes, et la place la plus élevée appartient aux martyrs. Dieu a pour les justes des couronnes dont il orne leurs fronts, des baldaquins sous lesquels il les fait reposer, des banquets qu’il leur prépare, des danses auxquelles il les convie. De même dans l’enfer. Les punitions y sont variées, quoique le feu y joue le principal rôle. L’enfer est tous les mois fraîchement réparé pour les troupes de Coré[2], et les Coréistes y bouillent comme la viande dans la marmite. Il a, de même que l’Éden, divers compartiments ; les grands coupables sont dans les lieux les plus profonds où ils se lamentent et reconnaissent la justice de la peine qui les frappe. Les âmes des méchants y sont plongées dans de sombres réflexions, et deux anges qui se trouvent aux extrémités du monde se lancent ces âmes-là de l’un à l’autre[3]. »

Les couleurs, comme on le voit, ne manquent pas au tableau, ni la fantaisie non plus. C’est même parce qu’on savait que tout

  1. Qu’on n’oublie pas que dans les Saintes Écritures il n’est fait mention ni l’enfer ni de paradis. Le mot Guehinnam est un nom purement emprunté de celui que possédait une vallée près de Jérusalem, et où les plus anciens habitants de la Palestine, les farouches Cananéens, avaient la barbare coutume de brûler des enfants en l’honneur de l’idole Moloch. Autant peut-on dire du mot Gan-Eden, paradis. Ce mot signifie dans le Pentateuque tout autre chose que le séjour des immortels ; il veut dire simplement le jardin planté par Dieu à l’usage du premier couple humain.
  2. Coré est celui qui s’est mutiné contre Moise. Voir Nombres, chap. XVI.
  3. Voir l’ouvrage précité.