Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/387

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tères de la charité qui, de la maison d’Hillel, s’était naturellement transmise à celle de Gamaliel comme un précieux héritage de famille.

Mais le Judaïsme a fait mieux encore que de fournir à la doctrine chrétienne le modèle de la véritable charité. Il a su de tout temps garantir cette dernière de certains excès qui peuvent lui devenir très funestes et en dénaturer complètement le caractère. Ainsi, il est beau d’aimer son prochain, mais à condition, toutefois, que, par trop d’amour pour lui, on n’aille pas attenter à sa liberté, ni violenter sa conscience dans le dessein de le rendre heureux malgré lui. Ce n’est malheureusement pas une chimère que nous combattons ici. Il s’est trouvé une époque néfaste où des bûchers ont été allumés dans le but fort charitable, à ce que l’on prétendait, de forcer les dissidents à abjurer des croyances religieuses considérées comme autant d’obstacles à leur salut. On sait le conseil donné à Ferdinand-le-Catholique par son confesseur Torquemada. Le père du roi qui avait su apprécier le rare mérite des Juifs de l’Espagne, avait, sur son lit de mort, recommandé à son fils de leur faire le plus grand bien possible. Et ce fut cette dernière volonté si noblement exprimée qui causa leur perte. Ferdinand VII hésitant sur les moyens à employer pour s’acquitter de son devoir filial, Torquemada lui fit comprendre qu’il ne pourrait faire aux Juifs de plus grand bien qu’en les forçant d’embrasser la religion catholique qui les sauverait de la damnation éternelle. Bientôt après, le Tribunal de l’Inquisition s’installa à côté du trône ; il fallut abjurer ou prendre le chemin de l’exil. Plus tard vinrent les auto-da-fé, et tout s’exécuta au nom de l’amour et de la charité.

Avouons que la plus implacable haine religieuse n’eût pas autrement agi, et un zèle pieux s’exagérant son devoir pour