Page:Sismondi - Nouveaux Principes d’économie politique.djvu/13

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ou l’autre face de ce double but. Les uns, amans passionnés de l’égalité, se révoltent contre toute espèce de distinction : pour évaluer la prospérité d’une nation, ils comparent toujours l’ensemble de sa richesse, de ses droits et de ses lumières avec la quote part de chacun ; et la distance qu’ils trouvent entre le puissant et le faible, l’opulent et le pauvre, l’oisif et le manouvrier, le lettré et l’ignorant, leur fait conclure que les privations des derniers sont des vices monstrueux dans l’ordre politique. Les autres, considérant toujours abstraitement le but des efforts des hommes, lorsqu’ils trouvent une garantie pour des droits divers, et des moyens de résistance, comme dans les républiques de l’antiquité, appellent cet ordre liberté, lors même qu’il est fondé sur l’esclavage des basses classes. Lorsqu’ils trouvent un esprit ingénieux, des réflexions profondes, une philosophie inquisitive, une littérature brillante, parmi les hommes distingués d’une nation, comme en France avant la révolution, ils voient dans cet ordre social un haut degré de civilisation, lors même que les quatre cinquièmes de la nation ne savent pas lire, et que toutes les provinces sont plongées dans une ignorance profonde. Lorsqu’ils trouvent une immense accumulation de richesses, une agriculture per-