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Page:Sismondi - Nouveaux Principes d’économie politique.djvu/442

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un effet contraire à celui qu'il en attendait. Mais l'économie politique est, en grande partie, une science morale. Après avoir calculé le profit pour les hommes, elle doit encore prévoir ce qui agira sur leurs passions. Quelque dominés qu'ils soient par leurs intérêts personnels, il n'est pas vrai qu'il suffise de leur faire voir leur avantage, pour les déterminer à le rechercher. Les nations ont quelquefois besoin d’être secouées, en quelque sorte, pour être réveillées de leur torpeur. Le poids léger qui suffisait pour faire pencher la balance chez un peuple calculateur, ne suffit plus lorsqu'elle est rouillée par les préjugés et les longues habitudes. Alors, un habile administrateur doit quelquefois se résigner à laisser faire une perte réelle et calculable, pour détruire une vieille coutume, ou changer une prévention funeste.

Lorsque des préjugés enracinés ont abandonné au mépris toutes les professions utiles et industrieuses ; lorsque une nation croit qu'il ne peut y avoir de dignité que dans un noble loisir ; lorsque des savants eux-mêmes, entraînés par l'opinion publique, rougissent des applications utiles qu'on a faites de leurs découvertes, il devient peut-être nécessaire d'accorder à l'industrie qu'on veut créer, des faveurs tout à fait extraordinaires, de fixer sans cesse la pensée d'un