Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/176

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Mais quoique les maîtres aient presque toujours nécessairement l’avantage dans leurs querelles avec leurs ouvriers, cependant il y a un certain taux au-dessous duquel il est impossible de réduire, pour un temps un peu considérable, les salaires ordinaires, même de la plus basse espèce de travail.

Il faut de toute nécessité qu’un homme vive de son travail, et que son salaire suffise au moins à sa subsistance ; il faut même quelque chose de plus dans la plupart des circonstances ; autrement il serait impossible au travailleur d’élever une famille, et alors la race de ces ouvriers ne pourrait pas durer au-delà de la première génération[1]. À ce

    sistance aux jours de leurs contestations sur un salaire plus élevé, on les a vus quelquefois accumuler, pendant la prospérité de leur industrie, un fonds commun destiné à les secourir dans leurs nécessités. La loi leur est contraire en réalité ; et cela, malgré la question qu’ils soulèvent, n’appelle en aucune manière l’intervention législative. Les rapports d’ouvrier à maître forment un contrat volontaire : et si la loi intervient pour forcer une des parties à se soumettre à l’autre, la nature même du contrat est changée ; le consentement mutuel, base de toute transaction, est détruit, et un individu se trouve dépouillé au profit d’un autre. D’ailleurs, le législateur n’a aucun intérêt positif à intervenir violemment dans les transactions des particuliers. Les ouvriers s’unissent pour provoquer, aux dépens de leurs maîtres, une hausse dans les salaires. Eh pourquoi pas ? Qu’importe au public, qu’en définitive, le gain revienne aux ouvriers ou aux chefs ? Si la société accorde un bon prix à un objet, il ne manquera pas d’abonder sur le marché ; et il n’est d’aucune importance, en tout ce qui peut la concerner, que ce prix soit divisé dans telle ou telle proportion entre les salaires et le profit. La marchandise acquiert son prix sur le marché et les deux parties intéressées se contestent le partage du butin ; mais, qu’a le public à faire de tout cela ? et pourquoi favoriserait-on une des parties au détriment de l’autre ? La vérité est que les coalitions de chefs et d’ouvriers sont amenées par la rareté du travail ou de l’ouvrage. Ce sont les effets naturels d’une cause plus générale ; et jusqu’à ce que la loi ait atteint cette cause générale, jusqu’à ce qu’elle ait créé un supplément de travail ou d’ouvrage, elle ne servira qu’à l’oppression des particuliers. Buchanan.

  1. Le salaire n’est pas seulement une compensation du travail, calculée à tant par heure d’après sa durée : c’est le revenu du pauvre ; et, en conséquence, il doit suffire non-seulement à son entretien pendant l’activité, mais aussi pendant la rémission du travail ; il doit pourvoir à l’enfance et à la vieillesse comme à l’âge viril, à la maladie comme à la santé, et aux jours de repos nécessaires au maintien des forces ou ordonnés par la loi ou le culte public, comme aux jours de travail. Sismondi.